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À propos de mon travail de plasticienne.
Ce travail a été réalisé entre 1987 et 2007
Dans la première galerie, Divers 1987/92, figurent des œuvres qui, toutes, ont laissé une empreinte dans ma vie de plasticienne. Certaines même correspondent à un grand tournant. Je me rappelle encore parfaitement ce qui me poussait, ce que je ressentais en les réalisant, les émotions que j’éprouvais… La colère, la rage, et surtout la joie.
Les autres galeries sont divisées en séries. Chacune présente un choix d’œuvres qui, malgré les années – 14 ans me séparent de la dernière série – me donnent l’impression de n’avoir pas vieilli. Leur existence même en témoigne puisque ce sont les seules qui, outre celles qui ne m’appartiennent plus, ont été sauvées des destructions successives à chacun de mes déménagements.
En les voyant défiler je repense à tous les matériaux, toutes les matières qui sont passés entre mes mains : béton, papier, vernis, polystyrène, colle, encres, grillages, cordes, laine, radiographies, goudron, ciment, poudre de marbre, peinture, photographies – qui, au fil des années, sont devenues de plus en plus présentes –, fibre de verre, résines, etc. C’est dans les squats artistiques que je me suis lancée dans ce type de recherche. Le support, lui, était toujours le même : le bois, très souvent creusé, ce qui me permettait d’y intégrer toute sorte de produits, de pénétrer à l’intérieur. Ce bois, je l’ai gratté, poncé, découpé, lissé, cloué… Il se peut même qu’il ait reçu quelques gouttes de transpiration, et des larmes aussi ! Ajouter, enlever…
J’ai vécu des moments formidables. Ces moments-là ont fait que je suis toujours là. Quant aux autres, les mauvais, les moments de doute, de déception, de révolte, même s’ils sont plus nombreux, je ne les renie pas car ils ont fait de moi une résistante.
Les thèmes
Très vite j’ai éprouvé le besoin de me mesurer à des thèmes correspondant à mon questionnement sur la vie qui m’entourait. J’ai commencé par des palissades qui parlaient de la grande ville, et que je présentais à travers des performances ou des spectacles en public : Les murs de la ville
À cette époque, je me suis impliquée socialement et politiquement dans la défense des squats artistiques. Nous étions une cinquantaine d’artistes associés pour occuper des usines ou des garages désaffectés ; une fois installés, nous prévenions les autorités qui nous permettaient d’occuper le lieu un certain temps. Ce fut une expérience riche en rencontres de toute sorte, avec des artistes venus de partout, avec des galeries, la télévision… Ce fut la rencontre d’un mécène, Éric Monti, représentant une race aujourd’hui disparue : il achetait nos œuvres, organisait pour nous des expositions. Ce fut une expérience marquée par des fêtes interminables, des échanges d’idées tous azimuts, et surtout une création sans préjugés ni limites. Mais cela a mal fini et je me suis isolée.
En 1989, je découvre à Colmar le Retable d’Issenheim de Grünewald, et c’est le choc. Je n’ai pas dormi durant plusieurs nuits, tentant d’imaginer comment je pourrais réaliser un retable contemporain articulé comme celui de Grünewald. Avec quel argent ? J’en ai parlé à Éric Monti, notre mécène, il a été enthousiasmé par l’idée. C’est lui qui a permis à mon rêve de devenir réalité, en le finançant et en louant un grand lieu pour le présenter avec musique, textes, lumières… Après six mois de travail, j’ai ainsi pu exposer le Retable de Paris dans d’excellentes conditions, accompagné d’une série de portraits de moines et de religieuses.
Dès lors, les thèmes se sont succédé ; une nouvelle étape commençait.
La femme prostituée : plus de cinquante tableaux où je tentais de montrer sans jugement de valeur ce qu’était pour moi « le plus vieux métier du monde », le plus vieil esclavage du monde.
La Condition humaine : la solitude, la souffrance, les victimes de la société sans pitié.
Le racisme : j’ai photographié des enfant de ma ville, ceux qui ne pouvaient pas partir en vacances, enfants d’émigrés maghrébins et africains, pour proposer avec ce matériau une réflexion sur le difficile mélange de ethnies.
Mujeres (Femmes) : quelle est leur place dans le monde de l’art et de la culture ? J’ai animé des conférences sur ce thème à l’occasion de deux expositions à Paris et à Barcelone.
Les Lieux : usines désaffectées encore pleines de la présence fantomatique des ouvriers qui y avaient travaillé pendant des années ; canal vidé de son eau et laissant apparaître toute sorte de déchets et de résidus, et des épaves de voitures et de motos.
Les Gares : arrivées, départs et rencontres ; valises, voies ferrées ; le train comme moyen de découverte de l’autre mais aussi de départ vers l’exil.
Vertiges : grands portraits avec des collages de photos, racontant les vertiges intérieurs, la peur de l’avenir…
Mon dernier travail plastique - "Un mot un tableau – Un tableau, un mot" - veut donner toute leur place aux mots qui, comme ils le peuvent, traduisent les émotions et les sensations qui nous accompagnent et nous habitent : Nostalgie, Mélancolie, Pessimisme, Émotion-Passion, Égocentrisme, Masochisme, Jouissance, etc.
C’est autour de cette série que s’est organisée ma dernière exposition, en 2007, étant plasticienne, présentant mes dix dernières années de travail, au Centre de culturel l’Embarcadère de Montceau les Mines.